D’après Jean-Pierre Papin : « Le foot reste un jeu et il faut que cela reste un jeu le plus longtemps possible »

Jean-Pierre Papin, est une légende du football français qui occupe aujourd’hui le poste d’entraineur à C’Chartres Football et le poste de consultant à beIN SPORTS. En équipe de France, il aura joué 54 matchs pour 30 buts ! Il a commencé sa carrière de footballeur professionnel à Valenciennes en 1984. Puis s’est envolé direction la Belgique au FC Bruges. En 1986, il signe à l’Olympique de Marseille où il reste jusqu’en 1992. Son passage à l’Olympique de Marseille est un véritable succès, il gagne quatre championnats de France consécutifs (1989,1990,1991, 1992) et une Coupe de France (1989) et a aussi réussi à se hisser en finale de Ligue des Champions (1991). Jean-Pierre Papin gagne le ballon d’or 1991. Ensuite le joueur français part pour l’AC Milan. Il s’engage ensuite au Bayern Munich, et gagne la Ligue Europa en 1996 contre Bordeaux. Jean-Pierre Papin rejoint ensuite le club bordelais puis quitte Bordeaux pour Guingamp en 1998. Il décide alors d’arrêter sa carrière de joueur professionnel. Il se plonge alors dans le monde amateur en jouant pour JS Saint Pierroise et US Lège Cape-Ferret. Jean-Pierre Papin est consultant depuis 2012 pour beIN SPORTS. Il commence sa carrière d’entraineur au FC Bassin d’Arcachon et connait sa première expérience en club professionnel avec Strasbourg et les fait monter en Ligue 1. Puis, il retourne dans le Nord pour entrainer le RC Lens. Il permet aussi de maintenir le LB Châteauroux en Ligue 2. Il est entraineur depuis 2020 du C’Chartres Football, club de National 2.

Bonjour Monsieur Papin,

Vous avez passé toute votre enfance dans le Nord et votre début de carrière, quels souvenirs avez-vous gardé de cette région ?

C’est ma région, j’y suis né. Je n’en ai que des bons souvenirs. J’aime beaucoup retourner là-bas, même si je n’y habite plus aujourd’hui. C’est quelque chose qui est ancré en moi. J’ai comme souvenir les valeurs des gens du Nord, c’est à-dire être accueillant, gentil, serviable et bosseur. Toutes ces valeurs-là qui font qu’on se reconnait de là où on vient.

Qu’est-ce qui vous a poussé à prendre la décision de faire du football votre métier ?

La passion, la passion comme moteur. J’ai pris la décision très tôt, j’avais 10-12 ans et déjà je voulais être footballeur professionnel.

Quels sont les joueurs qui vous ont le plus inspiré dans votre jeunesse ?

J’étais un grand fan du football anglais. J’avais comme équipes préférées Saint-Etienne et Manchester United. J’étais fan de Joe Jordan, joueur de Manchester United et de Michel Platini qui jouait à Saint-Etienne à l’époque.

Vous avez marqué 342 buts dans votre carrière, mais lesquels vous ont le plus marqué ?

Pour moi tous les buts sont importants parce que ce n’est pas simple de marquer un but. Mais pour moi le plus beau est celui de France-Belgique au Parc des Princes en 1991. Il faut bien qu’il y en ait un plus beau que les autres !

Quels sont les matchs dont vous avez le meilleur souvenir ?

Tous, mes meilleurs souvenirs c’est ma carrière. Bien sûr il y en a quelques-uns qui restent dans la légende. Je dirais que, s’il y en a un pour moi qui sort de l’ordinaire, c’est celui de la finale de Coupe de France en 1989 gagnée par l’OM. Sur ce match ci, on avait l’impression que rien ne pouvait nous arriver. Tout ce qu’on tentait, on allait le réussir. Je crois que ce jour-là, j’ai tout réussi, à part le pénalty.

D’après vous, quels sont les attaquants avec le jeu le plus spectaculaire ces dernières années ?

Je pense que Kylian Mbappé est un des meilleurs puisque son football est riche de ses qualités. Lors des 10 dernières années, l’un des joueurs le plus spectaculaire est Lionel Messi.

Vous avez joué deux finales de Ligue des Champions et vous avez gagné la Ligue Europa ; quel regard avez-vous sur le niveau des clubs français pour ces deux compétitions aujourd’hui ?

Je pense qu’avec Paris, on est dans le bon wagon. Pour les autres, je pense qu’on a un petit train de retard. En ce qui concerne l’Europa League je pense qu’on ne la joue pas comme on devrait.  Cette année en revanche, les clubs français la jouent à fond puisqu’ils n’ont pas de choix étant donné les adversaires en Europa League. La profondeur de banc manque aux clubs français pour aller loin. On essaye de mettre des jeunes et je pense que c’est une bonne solution. Le problème est qu’ils ne sont pas au niveau d’un banc de qualité. Donc c’est compliqué pour eux.

Qui d’après vous va être dans le dernier carré de la Ligue des Champions ?

Bien malin qui peut dire qui va y arriver ! Je vais me lancer, je vais dire Paris, le Bayern, Chelsea et Manchester City. Je ne prends pas de gros risques. Je ne pense pas que Lille va aller loin, ils vont se faire ramasser face à Chelsea. La grosse surprise peut être du côté de Paris. Et encore, du jour au lendemain, les joueurs du PSG peuvent passer à travers leur match. Il y a trop de hauts et de bas en ce moment à Paris. En Ligue des Champions, on ne peut pas passer avec des hauts et des bas. Je pense que l’adversaire du PSG en huitième de finale n’est pas la plus grosse équipe actuellement en Europe (NDLR : le Real Madrid). Ce sont deux équipes qui sont très proches l’une de l’autre. Le problème est que Paris peut gagner n’importe où, contre n’importe qui mais peut aussi perdre contre n’importe qui. Cela va se jouer à des détails.

Est-ce qu’être ballon d’or aujourd’hui a la même signification qu’à votre époque ?

Pour moi, oui, mais maintenant c’est d’une autre dimension parce qu’on l’a médiatisé alors qu’à l’époque ce n’était pas forcément le cas. Je ne suis pas d’accord sur le ballon d’or de cette année (NDLR : Lionel Messi). Je pense qu’en règle générale, ceux qui l’ont eu, l’ont forcément mérité. Cela se joue à pas grand-chose. Je pense que soit on respecte les critères qui ont été mis en place, à ce moment-là, Messi n’aurait jamais dû l’avoir cette année, soit on remet les votes comme c’était avant avec les journalistes et éventuellement les capitaines et les entraineurs, cela ne me dérange pas du tout. Cette année, je ne sais pas sur quels critères, ils ont voté. C’est bien beau de dire à un moment, il y en a 50, 30, 20. Si Messi a pu être ballon d’or alors qu’il a fait 4 ou 5 matchs en 6 mois, il a peut-être gagné une Copa America, ce n’est qu’un des critères. Lewandowski, cela fait deux ans qu’il marque but sur but, chaque match. Il faut qu’on m’explique pourquoi il n’est pas ballon d’or. Sincèrement je n’ai pas compris le vote de cette année.

Jean-Pierre Papin avec Raymond Kopa et Michel Platini (CREDITS : Chevalin/TF1/SIPA)

Quel niveau d’exemplarité doit avoir un joueur de foot ?

Le plus haut possible. Ensuite il faut beaucoup de respect envers le jeu, les personnes, les coachs, les supporters, les personnes qui décident dans ton club. C’est ce mot là pour moi qui est le plus important. Le joueur peut ne pas être d’accord mais je pense quand on respecte les personnes, on arrive à discuter des choses comme il faut. Il y a trop d’exemples aujourd’hui où quand on dit non à un joueur, il a une mauvaise réaction. Le respect ce n’est pas ça, c’est aussi savoir comprendre que les personnes ne sont pas obligées de dire oui à tout.

Vous avez monté une association, Neuf de Cœur, pouvez-vous m’expliquer l’objectif et ses actions pour les prochaines années ?

On a créé cette association avec mon épouse puisqu’on a une fille qui était handicapée à la naissance avec aucune de méthode de guérison possible. On a su par des personnes qu’il y avait des méthodes de rééducations qui avaient de bons effets sur ces enfants-là.  Quand on a commencé à faire cette méthode aux États-Unis, on a vu que cela marchait très bien. On s’est fait un devoir de donner l’information à toutes les personnes qui avaient le même problème. C’est pour cela qu’on l’a créée. Le but de l’association est de donner l’information qu’une méthode de guérison existe. Mais aussi à participer aux voyages sous forme de dons.

Comment s’est passée votre reconversion en tant que consultant ?

En fait j’ai un gros problème, c’est que j’aime le foot. Pour ce qu’il est, pour ce que je vois, pour ce qu’il m’a apporté. Depuis que je suis tout petit, je ne pense que football. Même encore aujourd’hui je pense encore beaucoup football, même un peu trop à mon avis. Mais j’aime ça et sans ça, je ne sais pas ce que je ferais aujourd’hui.

Comment s’est passée votre reconversion en tant qu’entraineur ?

Ma reconversion d’entraineur me paraissait logique. Le seul souci que j’avais, c’est que je n’étais pas sûr que cela me plaise autant que lorsque j’étais joueur.  Donc, j’ai pris donc beaucoup de temps pour me décider et à passer les diplômes.  Et puis quand j’ai eu passer ce temps, j’ai vraiment eu envie de passer ce costume. Entraineur c’est complétement différent puisque, joueur c’est jouer pour les autres et être entraineur, c’est décider pour les autres et ça c’est plus difficile.

Quels sont vos meilleurs souvenirs en tant qu’entraineur ?

Je pense que c’est Strasbourg, la montée en Ligue 1. Justement à force de répéter les mêmes choses aux joueurs, de leur faire comprendre qu’ils pouvaient remonter, on a réussi ce challenge.

Jean-Pierre Papin quand il entraînait Strasbourg (CREDITS : L’Alsace.Fr)

Quels nouveaux défis êtes-vous venu relever à Chartres ?

C’est grâce à une rencontre avec le président du C’Chartres, Gérard Soler. Cela faisait 6 ans qu’il essayait de me faire venir dans son club. J’avais toujours dit non mais avec la persévérance qui le caractérise, à un moment j’ai accepté. Il faut qu’on monte absolument. On a un projet qui est magnifique avec la mairie et le club et le projet prendra vraiment sa dimension quand on sera en National. L’objectif final est de monter en Ligue 2. C’est un très beau projet. On a un grand pôle de partenaires qui sont dans la ville. Chartres c’est une région très riche avec beaucoup d’agriculture et d’entreprises. Il y a une équipe de Handball en première division, une équipe de Volley en 2ème division, une équipe de basket en 3ème division et une équipe de rugby en Fédérale 1. Sur les cinq ans, l’objectif est que tous les clubs de sports collectifs soient en deuxième division. Tous les clubs s’appellent C’Chartes. C’est un club omnisports en fait. Il n’y a que le PSG, Bordeaux et Montpellier en France comme autres clubs omnisports. En plus ce n’est pas très grand Chartres, seulement 40 000 habitants, par contre, l’agglomération fait 180 000 habitants.

Jean-Pierre Papin avec Gérard Soler, le président du C’Chartres Football (CREDITS : C’Chartres football)

Quels sont vos conseils pour les jeunes footballeurs qui veulent devenir footballeur professionnel ?

C’est d’abord que le foot reste un jeu et il faut que cela reste un jeu le plus longtemps possible. Ensuite il faut être passionné par ce sport. Il faut beaucoup travailler, beaucoup écouter, prouver. Il y a une part de chance puisqu’il ne faut pas se blesser, il faut rencontrer les bonnes personnes, il faut faire les bons choix. Et ça, c’est quand on est bien entouré qu’on y arrive.

Vous avez travaillé récemment comme consultant chez beIN SPORTS, quels conseils donneriez-vous à des jeunes qui souhaitent travailler dans les médias sportifs ?

Déjà, je pense qu’il faut avoir la passion du sport dans laquelle on veut retranscrire. Il faut être passionné, à l’écoute, s’intéresser, se poser les bonnes questions. Je pense que c’est retranscrire ce qu’on voit en disant ce qu’on pense, cela est plus compliqué. Tu peux être objectif, critique, cela dépend de la façon dont tu veux passer ton message. Il faut juste être honnête.

Jean-Pierre Papin avec ses collègues de beIN SPORTS : Philippe Genin, Grégory Paisley et Alexandre Ruiz (CREDITS : Alexandre Ruiz)